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Mémoire de l’Avenir présente du 11 mai au 15 juin prochain Pour que la matière ait tant de pouvoir, faut-il qu’elle contienne un esprit ?, une exposition personnelle de la plasticienne Isabelle Terrisse.

 

Inspirée d’un passage de La Tentation de Gustave Flaubert*, où l’écrivain interroge à travers la figure de Saint-Antoine le pouvoir des représentations, Isabelle terrisse nous invite à questionner le pouvoir de la matière et de la forme quand elles se font œuvres, mais également l’image qu’elle offre à l’interprétation de chacun. La forme autant que la matière ont un pouvoir de transmission de mémoires tangibles et intangibles, un enjeu essentiel du travail de l’artiste.

 

 L’expérimentation de la matière est une obsession chez Isabelle Terrisse, donnant lieu à un répertoire de formes, d’idées, de langages extrêmement variés et d’une rare sensibilité. La réappropriation de matériaux jetés, trouvés, réemployés ; l’empreinte, l’image, sont autant de media qui viennent servir un discours très engagé.

 

D’abord celui qui vient en creux rendre hommage à la main, au « faire », à la créativité de l’« esprit » des femmes et des hommes que l’on observe dans les séries « embrases » ou « drapé ». Dans ces séries elle associe des pièces textiles récupérées à des  moulages de ses propres mains, ou encore détourne le tissage pour créer des drapés / sculpture constitués d’assemblages de boutons. Un engagement aussi envers les «Anonymes » : ceux qui participent à l’Histoire sans en être les héros, ceux qui marquent notre chemin, ceux qui dorment sur nos matelas dans la rue.

 

Le développement durable sous toutes ses acceptions est fil rouge dans l’Œuvre d’Isabelle Terrisse, notamment à travers la valorisation des savoir-faire et des matériaux. L’emploi très régulier du béton en est également une des manifestations. Dans ces pièces l’artiste pointe du doigt l’hyper-urbanisme, la perte de repères, l’amincissement des frontières entre l’espace public et l’espace privé.

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Dans l’ensemble de son travail l’artiste conjugue les contraires, relie les unions paradoxales, joue sur l’ambivalence des matières, des objets et des formes pour nous donner à voir les dysfonctionnements et les contradictions qui caractérisent nos sociétés contemporaines.

 

A travers l’empreinte, qu’elle soit photographique ou corporelle (moulage), ou l’emploi de matières préexistantes, Isabelle Terrisse questionne également la notion de trace laissée par les Hommes, en mettant en regard le désir d’immortalité face à l’inexorable éphémère. Par un assemblage d’éléments figuratifs l’artiste propose des œuvres concepts qui ouvrent à des questionnements philosophiques, éthiques, sociétaux et politiques qui touchent autant l’intime que l’habiter ensemble.

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* « Pour que de la matière ait tant de pouvoir, il faut qu’elle contienne un esprit » - La tentation de Saint-Antoine, Gustave Flaubert, 1874

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—Marie-Cécile Berdaguer - Margalit  Berriet, mai 2019

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De formation ingénieur chimiste, Isabelle Terrisse est artiste depuis quinze ans. Après avoir pratiqué la céramique, tout commence véritablement lorsqu’elle récupère sur son lieu de travail un stock de 4000 lames de microscope qui allait être jeté. Aujourd’hui, l’artiste plasticienne fait œuvre de tout matériau, proposant ainsi au regard une création éclectique et singulière.

 

Isabelle Terrisse utilise dans ses créations originales des objets donnés ou chinés, tels qu’un album de photographies du XIXe siècle (Anonymes) ou de la vaisselle (À table). Elle travaille par associations d’idées avec les matériaux : c’est en observant ces derniers qu’elle imagine l’histoire dont ils vont se faire les conteurs. À chaque nouvelle idée, l’artiste apprivoise la matière et apprend de nouvelles techniques de mise en forme (tissage, pliage, collage, sculpture, impression, etc.).

 

Ses œuvres hétéroclites abordent des procédés semblables, le passage du multiple à l’unique notamment, et développent des thématiques similaires liées au temps qui passe (Processus) à travers la confrontation en une même création d’oppositions telles que la vie et la mort (Nids d'abeilles), la robustesse et la fragilité (La fragilité de la vie), le solide et le liquide (Drapé), ou encore l’immobilité et le mouvement (Oxymore).

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— Maison des Arts Antony, exposition Artistes à découvrir, juin 2017

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Martine Bartholini et Isabelle Terrisse présenteront, du 16 au 29 novembre au Bateau lavoir, des œuvres en trois dimensions qu’apparente la rencontre en court circuit, l’interpénétration, d’identités foncièrement étrangères. Mais les deux artistes ne privilégient pas les mêmes champs.

 

 

 Chez Isabelle Terrisse, souvent, la violence s’intrique avec la douceur, la pesanteur de la matière avec la fragilité, la froideur du matériau avec la chaleur humaine, la menace du temps avec la palpitation du moment. Il y a des métamorphoses – ainsi, ces douilles de balles qui, en se juxtaposant font apparaître un rayon de miel – et il y aussi des unions paradoxales -  ainsi, entre la pesanteur d’une lourde masse en forme de fœtus et la fragilité de verre sur laquelle elle repose.

 

Chez Martine Bartholini, cela se passe plutôt entre le haut et le bas, le ciel et la terre, le spirituel et le viscéral. Lequel existe ici dans toute la force de sa crudité. Et dans un siècle très chrétien, la femme de cette audace n’aurait sans doute pas échappée aux supplices de l’Inquisition, avec sa robe de mariée née d’une métamorphose de boyaux de porcs, sa chimère composée d’hosties ou avec ses multiples compositions dans lesquelles les hosties s’unissent à des mues de serpent.

 

 Les œuvres que l’on découvrira, orientées par le désir de mettre en court circuit des dualités foncièrement étrangères, se situent dans une mouvance où il n’est pas rare aujourd’hui de rencontrer le mépris du beau. Mais elles sont belles et par là, oserai je dire, sont aussi pour demain.

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— Claude-Luca Georges, exposition "Est-ce ainsi que les femmes rêvent? "en duo avec Martine Bartholini, novembre 2016

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